La présence du procureur de Téhéran au sein de la délégation iranienne du Conseil des droits de l’homme a causé une vive polémique cette semaine au Palais des Nations, à Genève.

Les défenseurs des droits de l’homme tels que Human Rights Watch ou Reporters sans frontières, mais aussi le Canada, ont jugé inacceptable que Saïd Mortazavi ait participé aux premiers jours de la session inaugurale. Motif : ils accusent le procureur de Téhéran d’avoir permis à ses agents de sécurité de torturer à mort la journaliste irano-canadienne Zahra Kazemi en juin 2003. Mais aussi d’avoir ordonné la fermeture de plus d’une centaine de journaux.

Chef de la délégation iranienne et ministre de la Justice, Jamal Karimi-Rad a reçu le Temps à la Mission d’Iran pour donner son avis sur la question.

  • Comment expliquez-vous la présence de Saïd Mortazavi au sein de votre délégation ?
  • Le cas de Mortazavi est cité régulièrement par le Canada et d’autres pays. Tout a été dit à son sujet. Je suis néanmoins surpris des déclarations diffamatoires faites à ce sujet par le Canada. Les autres Etats n’ont pas à interférer dans la désignation des personnes que nous souhaitons avoir dans notre délégation.
  • Des officiels iraniens déclaraient il y a deux jours que Saïd Mortazavi était dans l’avion pour l’Iran. En réalité, il était à l’ambassade d’Iran à Berne et n’a pris l’avion que vendredi après-midi. Est-il toujours membre de la délégation ?
  • Je suis le chef de la délégation, je peux déterminer qui en fait partie. Je vous le confirme, il est toujours membre de la délégation.
  • N’avez-vous pas l’impression de porter atteinte à la crédibilité naissante du Conseil des droits de l’homme ?
  • Nous croyons en ce nouveau Conseil pour autant que tous les Etats écoutent ce que les autres ont à dire et qu’ils soient écoutés. C’est la doctrine de notre président Ahmadinejad. Nous gardons d’ailleurs un mauvais souvenir de la Commission des droits de l’homme, qui exerçait une très forte pression sur nous, mais oubliait les violations des droits de l’homme perpétrées en Afghanistan, en Irak ou en Asie centrale. Elle oubliait aussi les tueries quotidiennes commises par Israël. Ce que nous trouvons inacceptable, c’est que certains pays se permettent d’agir unilatéralement et attendent que, quand ils parlent, le monde entier les écoute.

- Les défenseurs des droits de l’homme s’inquiètent de la situation des droits de l’homme en Iran. Qu’en est-il ?

  • L’image négative de la situation en Iran est sans fondement. Ceux qui avancent ces accusations n’ont pas prêté attention aux efforts qui ont été entrepris ces dernières années. Nous avons une structure étatique chargée des droits de l’homme, dirigée par le ministre de la Justice et qui compte cinq autres ministres. Au niveau local, nous avons des bureaux de promotion des droits de l’homme.
  • Cela ne vous empêche pas d’avoir interdit plus d’une centaine de journaux.
  • Nous avons une loi sur la presse très claire. Si un journal se rend coupable de blasphème ou de diffamation, l’Etat peut demander un droit de réponse. Si le journal n’y donne pas suite, il peut être effectivement interdit. Le droit de l’individu, en l’occurrence celui du journal, ne doit pas saper le droit des autres.
  • L’affaire Mortazavi n’est pas la seule à défrayer la chronique. Il y a aussi le programme nucléaire iranien...
  • C’est une polémique que vous fabriquez vous-même. De nombreux pays nous soutiennent. Même la Suisse coopère activement avec l’Iran. Par rapport au programme nucléaire, nous pensons avoir le droit légitime de produire de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.
  • Que pensez-vous de Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix et militante des droits de l’homme ?
  • Je ne comprends pas votre question. C’est une Iranienne qui vit en Iran et qui voyage.

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