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400 ONG et avocats portent plainte contre Israël

Après le président soudanais Al Bashir, au tour des dirigeants israéliens de comparaître devant les tribunaux ? Une coalition a porté plainte contre Israël devant la Cour pénale internationale suite à la dernière attaque contre Gaza

Isoda Agazzi/Infosud/Tribune des droits humains - « A ce jour, l’hypothèse que la Cour pénale internationale (CPI) ouvre une enquête et qu’Israël soit reconnu coupable de crimes contre l’humanité est crédible, si ce n’est probable. » Gilles Devers, avocat au barreau de Lyon, participait hier à une table-ronde organisée par la Commission arabe des droits humains au Palais des Nations. « Début janvier, des ONG m’ont demandé ce qu’on pouvait faire face au massacre de Gaza et je leur ai conseillé de saisir la CPI. J’ai rédigé une plainte pour crimes de guerre et contre l’humanité qui a été déposée devant la Cour, le 22 janvier, par une coalition de 450 associations et 40 avocats de par le monde. Cette démarche est faite en accord avec toutes les forces politiques palestiniennes. »

Le problème est que la Cour n’est compétente que vis-à-vis de ressortissant d’Etats qui ont signé le traité de Rome. « Mais ce qui a fait basculer le dossier, c’est que l’Autorité palestinienne (AP) a validé notre démarche. Le même jour, elle a signé le traité et donné compétence à la Cour pour enquêter sur le territoire de Gaza de façon rétroactive, depuis 2002 » explique l’avocat.

Ali Kashan, Ministre de la justice de l’Autorité palestinienne, confirme que la CPI « a accepté notre plainte. S’il y aura une enquête, nous sommes prêts à y participer. »

Dans la phase préliminaire, le procureur est en train d’analyser s’il est « raisonnable » d’ouvrir une enquête. « L’AP doit présenter les documents qui prouvent qu’elle est bien un Etat, un sujet de droit international. Quant à nous, nous préparons l’audition des témoins et cherchons des soutiens politiques. Il y a 110 Etats qui ont signé le statut de Rome et qui peuvent se manifester » continue Me Devers.

« L’idéal serait que la requête palestinienne soit acceptée et qu’une enquête soit ouverte sur cette base, car cela impliquerait la reconnaissance de la personnalité juridique internationale de l’AP » souligne Haytham Manna, de la Commission arabe des droits humains et coordinateur de la coalition. « Sinon, on a la possibilité d’intervenir avec d’autres Etats. Trois pays d’Afrique et d’Amérique latine se sont déclarés prêts à saisir la CPI. »

Les pays arabes ne sont-ils pas intéressés ? « Le seul à avoir ratifié le statut de la Cour est la Jordanie, relève Me Devers. Le parlement jordanien a adopté une résolution dans ce sens il y a un mois, mais on attend la suite. Les pays arabes reprochent au procureur d’appliquer un double standard dans le traitement de l’affaire Al Bashir. C’est vrai qu’il y a un double standard et c’est scandaleux ! Mais c’est le fait du Conseil de sécurité, qui a demandé au procureur d’enquêter sur le Soudan, non membre de la CPI, mais n’a rien fait contre Israël. »

La coalition des ONG et des avocats n’attend pas uniquement que la CPI agisse. Ses membres travaillent aussi sur le principe de la compétence universelle, qui permet de porter plainte, devant les tribunaux nationaux, pour des crimes de guerre et contre l’humanité commis à l’étranger par des étrangers. « Nous avons des équipes d’avocats en Norvège, en Espagne, en Angleterre, en Belgique et en France, pour les plaintes individuelles. Et nous allons essayer d’activer la compétence universelle en Suisse » conclut Haytham Manna.

Seize personnalités appellent les Nations Unies à enquêter sur Gaza

Un groupe de seize personnalités de haut rang ont demandé le 16 mars au secrétaire général des Nations Unies une commission d’enquête "prompte, indépendante et impartiale" sur le dernier conflit à Gaza. Soulignant que les vioations des deux parties -Israël et les groupe palestiniens- devaient être prises en considération, la lettre exige que l’enquête soit organisée par les Nations Unies, mais ne se limite pas aux attaques dont les Nations Unies ont souffert. Mary Robinson, ancienne présidente d’Irlande et Haut commissaire aux droits de l’homme de 1997 à 2002, Richard Goldstone, procureur pour les tribunaux sur le Rwanda et l’ex-Yougoslavie de 1994 à 1996 et l’archevêque et prix Nobel de la paix Desmond Tutu font partie des signataires.

Michel Bührer/Tdh