La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et son affiliée aux Etats-Unis, le Center for Constitutional Rights (CCR) se félicitent de la décision historique prise par la Cour Suprême, jeudi 29 juin 2006, à 5 voix contre 3. La Cour suprême déclare que le Président américain George W. Bush a outrepassé ses prérogatives en ordonnant la mise en place de commissions militaires pour juger les détenus emprisonnés à la base navale de la baie de Guantanamo.

Les juges de la Cour suprême concluent que « les commissions militaires convoquées pour juger Hamdan ne sont pas compétentes car leurs structures et leurs procédures violent à la fois le Code de justice militaire américain (1) et les Conventions de Genève. Quatre d’entre eux concluent également « que les crimes pour lesquels M Hamdan avait été mis en accusation ne peuvent être jugés, selon le droit de la guerre, par des commissions militaires ».

Le 3 novembre 2001, le président Bush avait autorisé, dans une ordonnance militaire, la poursuite par des tribunaux spéciaux (Commissions militaires) des auteurs soupçonnés d’avoir violé les lois et les coutumes de la guerre en se rendant complices d’actes terroristes contre les Etats Unis. La Cour suprême déclare ces tribunaux illégaux.

La Cour suprême reconnaît également que l’article 3 commun aux Conventions de Genève ne doit pas être ignoré dans le contexte de la lutte contre Al-Qaeda : « l’expression garanties judiciaires reconnues comme indispensables par les peuples civilisés contenue dans l’article 3 commun aux Conventions de Genève n’est pas définie, mais elle doit être comprise comme comprenant au moins des garanties minimales lors d’un procès, reconnues par le droit international coutumier ».

M Salim Ahmed Hamdan, citoyen yéménite détenu par les Etats-Unis et désigné par le Président Bush pour être jugé devant une « commission militaire » à Guantanamo, avait porté plainte mettant en cause la compétence du président à mettre en place ces commissions militaires, et ce en l’absence d’une décision spécifique du Congrès. Il dénonçait également les procédures militaires ouvertes à son encontre en violation des Conventions de Genève. L’appel déposé par M Hamdan a été rejeté en juillet 2005. La Cour suprême des Etats-Unis a accepté d’examiner cette décision, qu’elle a cassée le 29 juin 2006.

Dans le cadre de cette procédure le CCR, la FIDH et Human Rights Watch, avaient déposé, en janvier 2006, un « Amicus curiae » (analyse juridique en soutien à une des parties du procès) selon lequel : « les systèmes de détention et de commissions militaires crées par l’exécutif pour retenir et juger les personne saisies dans la « guerre contre le terrorisme » et mise en oeuvre à la base navale des Etats-Unis à Guantanamo, constituent une violation des normes bien établies en droit international humanitaire comprises dans le droit international conventionnel et coutumier (2) ».

La décision de la Cour suprême confirme la position des organisations de défense des droits de l’Homme et constitue une sévère défaite pour l’administration Bush.

Selon le CCR « la décision de la Cour suprême rendue dans l’affaire Hamdan contre Rumsfeld est une victoire importante au regard de la reconnaissance du droit à un procès juste et équitable inscrit dans la Constitution. Elle donne raison au travail mené depuis cinq ans au nom de la bonne administration de la justice et du respect des droits de l’Homme contre les détentions illégales sous l’Administration Bush ».

« La prochaine étape consiste maintenant à permettre que les personnes détenues dans d’autres centres contrôlés par les Etats-Unis, tels que Baghram en Afghanistan ou des centres de détention secrets, puissent être protégées conformément aux Conventions de Genève et soient traitées humainement, conformément à l’article 3 commun », a déclaré Sidiki kaba, président de la FIDH..

La FIDH et le CCR réitèrent leur demande de fermer Guantanamo, où sont encore détenus des centaines de personnes et demandent à l’administration Bush de libérer les détenus qui n’ont pas encore été inculpés ou de les juger devant un tribunal impartial et indépendant.

Le Président du CCR, Michael Ratner conclut : « la Cour suprême a fermement rejeté la tentative du président Bush d’écarter la compétence des tribunaux américains. Maintenant, il est temps pour le Président Bush d’agir : juger nos clients devant les tribunaux compétents américains ou les libérer. Le président Bush ne peut plus se cacher derrière un soi-disant vide juridique pour ignorer le caractère illégal et immoral de la prison de Guantanamo. »

(1) Uniform Code of Justice Military (UCMJ)

Karine Appy

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