Décidément, l’ONU ne lâche pas les Etats-Unis. En mai dernier, le comité contre la torture condamnait sans détour la Maison Blanche pour les prisons secrètes et les mauvais traitements infligés aux prisonniers soupçonnés de terrorisme.

Aujourd’hui, c’est le Comité des droits de l’homme qui accuse le gouvernement Bush de bafouer les droits civils et politiques de ses citoyens ou des étrangers vivant sur sol américain. Dans un document inédit de 15 pages, l’organe onusien demande à Washington de s’expliquer sur les nombreux dérapages des contrôles policiers effectués au nom du Patriot Act.

Les 17 et 18 juillet, la délégation américaine devra répondre aux questions des 18 experts indépendants venus du monde entier. Ces derniers sont chargés de veiller à l’application du pacte des droits civils et politiques, l’un des deux piliers du système onusien.

Exactions sur les minorités en hausse depuis septembre 2001

Le contenu du document, qu’InfoSud a pu obtenir en primeur, dépasse largement les abus commis dans le cadre de la lutte antiterroriste au Moyen Orient et à Guantanamo. Il révèle comment les nombreuses exactions sur les minorités - raciales, ethniques, religieuses, sexuelles - ont augmenté depuis le 11 septembre 2001. Même la liberté d’association, la sécurité et l’intimité individuelle sont menacées.

Sur quels critères sélectionnez-vous ceux que vous mettez sous écoute téléphonique, sous contrôle électronique ou de fax ? Interroge l’ONU. Et selon quelles bases juridiques gardez-vous en détention ou déportez-vous des personnes soupçonnés d’avoir aidé une organisation terroriste ? Et d’ailleurs comment définissez-vous le terrorisme ?

Nouveau point fort : le comité entend examiner les activités - restées très obscures - des commissions militaires. Ces dernières ont été instaurées par Bush pour remplacer les tribunaux militaires pour la mise en procès des présumés terroristes. Mais la Cour suprême américaine est en train de déclarer ces commissions illégales.

Listes noires et dissidents politiques

L’ONU va plus loin en citant des exemples précis. Par exemple, ce citoyen qatari, Ali-Saleh Kahlah al-Marri, pourquoi a-t-il été incarcéré sans charge dans une prison militaire des Etats Unis ? Et selon quelles modalités établissez-vous les listes noires sur vos vols aériens ? Vos dissidents politiques sont-ils punis parce qu’ils protestent contre la guerre ?

En fait, les questions du Comité sont souvent des accusations en soi : sur quel critère s’opèrent les “assassinats sélectifs” (quand telle famille irakienne ou afghane est sauvagement tuée du plus vieux au plus jeune) ? A nouveau, l’ONU exige des rapports sur la situation de milliers de personnes détenues pour raisons de sécurité, dans des lieux ou des navires cachés.

Et encore : quelle politique permet d’envoyer des personnes soupçonnées de terrorisme à des fins d’interrogatoire vers des pays tiers connus pour leurs pratiques de torture ? Et les assassinats de journalistes en Afghanistan et en Irak ? Quels ont été les résultats des jugements pour tortures commises par le personnel américain dans le pénitentier d’Abu Ghraib en Irak ?

Les positions insupportables, les isolements, les privations sensorielles, l’exposition au chaud et froid, l’altération du sommeil, les questions non stop durant vingt heures, la confiscation des vêtements, des effets personnels et religieux, le rasage forcé, les tentatives d’étouffement comme le sous-marin. Toutes ces techniques d’interrogatoire barbares ont-elles été abolies ?